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rentrèrent dans leurs foyers. Vous vous rappelez les touchants adieux de Washington.

Depuis ce jour, l’histoire des créanciers militaires se confond avec celle des créanciers ordinaires de l’État, et nous nous trouvons ramenés à l’examen général de la situation financière de l’Amérique, de 1782 à 1783.

La dette de l’Amérique était considérable. Songez que nous sommes en 1783, dans un pays pauvre qui ne comptait pas trois millions d’habitants. Au 1er janvier 1783, la dette des États-Unis montait à deux cent dix millions de francs, et l’on payait douze millions de francs d’intérêts.

Deux cent dix millions de francs, nous en avons vu bien d’autres ! Quand nous pensons que la révolution française s’est faite pour un déficit de soixante millions, cela nous étonne. Quel petit prince n’a pas aujourd’hui soixante millions de dettes ? Mais l’Amérique n’en était pas encore à ce degré de civilisation, et sa dette était pour elle un lourd fardeau dont elle cherchait à se débarrasser. Aussi, dès 1781, on avait proposé dans le congrès d’établir des droits ad valorem sur tous les objets importés en Amérique, sauf les objets de première nécessité, de manière à faire un fonds qui payât les intérêts et l’amortissement de la dette. Cette proposition avait été soumise aux États, mais, chaque fois qu’on suivait cette marche, on pouvait être sûr qu’au bout de deux ou trois ans on n’aurait pas encore de réponse. On attendit : on avait créé un surintendant des finances, Robert Morris, et on lui avait donné un coffre-fort vide. Morris était un homme plein de ressources et d’intelli-