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Les recommandations de Washington n’eurent guère plus d’effet que les prières du congrès ; c’est à peine si à la fin de 1782 on obtenait les dix mille hommes demandés. Dans cette année 1782, l’armée périssait faute de secours. Depuis sept ans qu’elle faisait la guerre, on ne l’avait pour ainsi dire jamais payée ; on lui avait de temps en temps donné des dollars en papier qu’on comptait aux soldats comme valant cinq francs et qui valaient quelques sous ; ils n’avaient pas reçu le cinquième de leurs rations. Il y avait donc dans les camps de grandes souffrances auxquelles on avait remédié tant bien que mal par quelques réquisitions. Triste exemple de l’indifférence d’un grand pays !

Qui le croirait ? Après sept ans de guerre, ni les États, ni le congrès n’avaient pu s’entendre sur la position qu’on ferait aux officiers. Quand ils s’étaient engagés, on leur avait promis de leur donner des terres, c’est la seule promesse qu’on leur avait faite ; mais, dans un pays où le service est libre, les officiers s’étaient lassés de souffrir, de combattre pour un pays qui, pour prix de leurs fatigues et de leurs blessures, ne leur montrait en perspective que la misère. Ils avaient demandé qu’on leur assurât, ce qui existe dans tous les pays du monde, une retraite ; et cette retraite, ils l’évaluaient à peu près à la demi-solde.

Faire adopter cette mesure de justice par le congrès de la confédération était impossible. Cela tenait à une idée fort répandue en Amérique, et que les colons avaient importée d’Angleterre : c’est qu’il n’y a rien de plus dangereux que les armées permanentes, et qu’on