Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 3.djvu/129

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

papiers, le papier jaune, puis le papier vert, puis le papier rouge, qui nous annoncent l’huissier, le garnisaire et tous ces excellents serviteurs de la société, qui, nous le savons, ne la servent pas pour rien. Voilà le fonds de l’unité nationale. C’est la force, une force légitime d’ailleurs, et, pour moi, j’ai le plus grand respect pour la force quand elle est au service du droit. Et ici, elle est nécessaire pour maintenir cette unité précieuse, pour faire qu’au moment où la patrie est menacée, nous soyons tous rassemblés en un faisceau puissant.

Mais, remarquez-le bien, cette unité a des limites ; c’est là qu’après vous avoir montré en quoi nous sommes supérieurs à l’Amérique de 1778, je me retourne, et dis : N’allons pas trop loin. J’ai vu souvent soutenir que l’unité emportait la centralisation administrative, et que l’État devait avoir toujours le dernier mot en toute chose. C’est là qu’est l’erreur. Pour que l’unité nationale existe, nous le voyons par l’exemple de la constitution américaine, ce qu’il faut, c’est que la puissance financière, diplomatique, militaire, la haute police dans l’État, le droit de forcer chacun à obéir à la loi, le droit de faire administrer la justice, appartiennent au gouvernement. Mais là sa puissance s’arrête, car partout où les citoyens peuvent avec plus ou moins de frais se charger eux-mêmes des services qui ne sont pas des services généraux, il n’est pas besoin que l’État en prenne le souci. Qu’ai-je besoin que l’État se mêle de mon salut ? je peux payer moi-même le prêtre qui priera pour moi, il n’y a là aucun affaiblissement de la puissance centrale. La société a intérêt