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« À BENJAMIN HARRISON,
« président de la chambre des représentants de virginie.
« Quartier-général, Middlebrook, 18 décembre 1778.
« Cher monsieur,

« Ayez la bonté de présenter à la Chambre la lettre ci-jointe, lorsque vous trouverez une occasion favorable ; je suis fort touché du témoignage de bon souvenir que m’a donné cette assemblée. Posséder l’estime de mes concitoyens est mon plus grand bonheur, ma meilleure consolation au milieu des soucis et des difficultés de ma situation.

« Je ne puis assigner que deux raisons à la persistance que nos ennemis mettent à demeurer chez nous. La première, c’est qu’ils attendent la décision du Parlement : la seconde, c’est qu’ils espèrent profiter de nos souffrances, sur lesquelles comptent aussi, non sans quelque raison, je le dis à regret, les commissaires envoyés pour traiter avec nous. Le ciel seul peut savoir ce que produiront d’aussi nombreuses, d’aussi fréquentes émissions de papier-monnaie, ce qu’amènera la folie de nos partis, le relâchement général des vertus publiques.

« Je suis effrayé à cette seule pensée : cependant, il me semble aussi clair que le jour qu’à aucune époque l’Amérique n’a eu autant besoin de la sagesse et du patriotisme de ses enfants ; et si ce n’est pas un juste sujet d’affliction générale, je suis, quant à moi, vivement et douloureusement préoccupé de voir que les États sont trop touchés de leurs intérêts locaux, et que les hommes les plus habiles se sont retirés du congrès, au grand détriment du bien public.

« On peut comparer notre système politique au mécanisme d’une horloge, et nous devrions en tirer une leçon. À quoi sert de maintenir les petites roues en bon état, si l’on néglige la grande roue, qui est le point d’appui et le premier moteur de toute la machine.