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Je ne veux pas faire aujourd’hui la biographie d’Hamilton ; je dirai seulement : c’était un de ces politiques qui, dès le premier jour, voient le mal et le remède.

Les opinions d’Hamilton sont doublement intéressantes, car il fut non-seulement l’ami, mais l’inspirateur de Washington. Je ne connais rien de plus touchant dans l’histoire, que les rapports de ces deux hommes. Washington a pour lui l’âge, la sagesse, la position ; Hamilton, fils d’une Française, est un esprit vif et ardent ; il va au fond des choses, mais il lui manque l’autorité, Les deux amis se complètent l’un par l’autre. Presque toujours c’est Hamilton qui le premier voit ce qu’il y a à faire, et qui l’écrit au général. Washington, avec la solidité un peu lourde du caractère anglais, commence par être effrayé de ce que lui dit Hamilton : la première chose qui le frappe, c’est la difficulté. Six mois après, le général revient à la charge ; et, après de longues réflexions, adopte l’idée de son conseiller. C’est alors que Washington se montre dans toute sa grandeur. Une fois qu’il a saisi la vérité, le héros se révèle. C’est une des plus grandes volontés que le monde ait vues, c’est l’homme qui, une fois résolu, a le moins reculé. Comme il s’est décidé mûrement, après un long et sincère examen, il sent que devant Dieu et devant sa conscience il ne lui reste plus qu’à agir. Quel que soit le péril, il marche devant lui. C’est là ce qui rend si intéressante l’étude de ces deux personnages qu’on a jusqu’ici trop peu rapprochés l’un de l’autre : l’un est l’idée ; l’autre est l’âme et le bras.

Dans une lettre à George Clinton, lettre datée du 13 février 1778, on voit Hamilton s’inquiéter de l’aban-