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qu’aucun de ses prédécesseurs n’avait fait[1]. » Confiants dans leur travail et leur logique, ces esprits étroits sont entêtés, sans savoir commander, et mènent un pays à l’abîme avec une sécurité qui ne les abandonne jamais. Ils ressemblent aux médecins de Molière : pourvu que le patient meure dans les formes, ils ne doutent pas un moment ni de leur droit, ni de leur génie.

Grenville voulut mettre un impôt sur les plantations. La dernière guerre avait été entreprise pour défendre les colonies, il lui semblait juste que les colons prissent leur part des lourdes charges que la victoire avait laissées. La dette publique anglaise était de 140 000 000 liv. st. (3 500 000 000 fr.)[2]. Les planteurs avaient fourni plus que leur contingent d’hommes et d’argent : dans la guerre contre la France, ils avaient dépensé 16 000 000 de dollars (80 000 000 fr.), sur lesquels le Parlement leur avait remboursé 5 000 000 de dollars (25 000 000 fr.)[3] ; cependant ils n’auraient pas refusé de contribuer, si on leur avait demandé un libre concours. Grenville n’y songea même pas ; il avait pour lui la lettre de la loi ; il ne lui vint pas à l’esprit de mettre en balance le danger d’aliéner les colons et le revenu net d’un impôt.

Toutefois, il faut lui rendre cette justice, qu’il ne procéda point de façon violente ou téméraire.

Dans la session de 1764, Grenville proposa tout un

  1. Lord Mahon, Hist. of Engl. ; ch. xliii, t. V, p. 84. Édit. de Lepsig.
  2. Hildreth, II, 510.
  3. Hildreth, Hist. of the U. S., t. II, p. 514.