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vaient de constituer une noblesse sur cette terre d’égalité, afin de diviser les intérêts, et de rattacher la classe riche à la monarchie, et aux institutions aristocratiques de la mère patrie ; des légistes proposaient (et on les écouta) d’établir des juges amovibles, de façon à assurer le triomphe des lois de la métropole et des idées du gouvernement. Enfin des financiers, gens qu’on ne repousse guère, s’occupaient de tirer un revenu des colonies, par l’intervention du Parlement, soit afin d’affranchir les ministres des critiques et des gênes qu’opposaient les législatures coloniales, soit pour assurer et fortifier les lois de navigation et de commerce, soit pour créer de nouvelles sinécures (grand moyen de gouvernement parlementaire), soit enfin pour retirer les fonctionnaires coloniaux de la dépendance des planteurs, et les mettre dans la main de l’État.

Ce furent les financiers qu’on écouta les premiers. Leurs mesures semblaient d’exécution facile, il ne s’agissait que de réclamer l’obéissance à de vieilles lois qu’on négligeait d’appliquer. L’Amérique ne contestait pas, en principe, le droit qu’avait le Parlement de régler le commerce, pouvait-elle se refuser à l’exécution de lois votées par la suprême puissance législative ? À vrai dire, Franklin lui-même ne le croyait pas.

Ce fut alors qu’un homme, jusqu’alors inconnu, un simple avocat de Boston, donna le signal de la résistance, et qu’il alluma un feu qui ne devait plus s’éteindre. Cet homme, dont le nom est resté cher à l’Amérique, mais est à peu près inconnu en Europe, c’était James Otis.