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et, malheureusement pour nous, ni M. de Choiseul, homme de manège plus que de génie, ni Louis XV, énervé par la mollesse, n’étaient de taille à lui résister.

Un homme tel que Pitt n’embarrasse point sa marche par de petites querelles. Les planteurs lui fournissaient des hommes et de l’argent, cela suffisait ; il ne voulait pas tarir cette ressource par une querelle avec les colons.

Et d’ailleurs ces colons, c’étaient des Anglais, des citoyens. À ce titre, Pitt respectait leur indépendance et refusait d’attenter à leurs droits.

Il nous le dit lui-même dans le fameux discours qu’il prononça en 1766 sur le rappel du droit de timbre :

« Dans les administrations qui ont précédé celle-ci, personne n’a voulu, personne n’a songé à voler aux colons leurs droits constitutionnels. Cela était réservé pour marquer l’ère nouvelle de la dernière administration. Non pas qu’il ait manqué de gens, lorsque j’avais l’honneur de servir Sa Majesté, qui m’aient proposé de me brûler les doigts à un acte de timbre. Dans un jour de détresse, quand les Américains avaient l’ennemi à dos et nos baïonnettes sur la poitrine, peut-être les planteurs se seraient-ils soumis à cet impôt. À prendre un pareil avantage, il n’y avait ni générosité ni justice. Je n’ai pas voulu… »

Mais quand, en 1760, l’avènement de George III eut amené la chute de Pitt, et donné le pouvoir à des créatures telles que lord Bute, l’idée dominante, l’idée qui se retrouve toujours dans les cerveaux étroits, fut qu’il fallait fortifier la prérogative, c’est-à-dire l’autorité.