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au moyen d’une taxe mise par le parlement sur les Colonies. On en arrivait ainsi au problème devant lequel Walpole avait reculé.

Dans les Colonies, le projet ne fut pas mieux accueilli ; on trouva qu’il y avait trop de prérogative ; le Connectiez le rejeta, le Massachusetts s’y opposa, et New-York, où Franklin, à son retour d’Albany, avait été chaleureusement reçu, fit un très-froid accueil au projet[1]. Dans le pays même qui avait délégué Franklin, dans la Pensylvanie, le projet ne fut pas plus heureux. « Une manœuvre de certains membres, dit-il, fit qu’on saisit le moment où j’étais absent (ce qui n’était pas très-loyal), et on écarta mon plan sans discussion, ce qui ne fut pas pour moi une petite mortification[2]. »

« Les motifs différents et contraires qui dégoûtèrent de mon plan, continue-t-il, me font soupçonner qu’il tenait un juste milieu, et je suis encore d’avis[3] que son adoption eût été heureuse pour les deux parties. Unies de cette façon, les Colonies auraient été assez fortes pour se défendre elles-mêmes ; on n’aurait pas eu besoin de troupes anglaises, et par conséquent il n’y aurait pas eu de prétexte pour taxer l’Amérique. On eût évité la lutte sanglante que ces prétentions ont amenée.

« Mais (ajoute-t-il avec sa longue expérience) de telles méprises ne sont pas nouvelles ; les histoires sont pleines des erreurs des États et des princes.

« Regarde la terre, tu verras combien peu de gens connaissent leur véritable bien, ou le connaissant le poursuivent.

« Ceux qui gouvernent ont tant d’affaires sur les bras

  1. Bancroft, Amer. Rev., I, 141.
  2. Mémoires, p. 53.
  3. Franklin écrit ses Mémoires après la conquête de l’indépendance.