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Quant à la possession, il n’y en avait point de trace. Tandis que nous avions soixante forts établis, le long des lacs et des rivières, les Anglais n’avaient pas encore descendu la montagne ; et, comme le disaient les Indiens : « Les Français sont des hommes, ils se fortifient partout ; vous, vous êtes des femmes ; il n’y a qu’un pas du Canada ici, les Français viendront aisément et vous mettront à la porte[1]. »

Pour s’emparer de la vallée de l’Ohio, le gouverneur de la Virginie, Dinwiddie, envoya, en 1754, à la tête de cent cinquante volontaires[2], un jeune homme de vingt-deux ans, qui, l’année précédente, avait déjà reconnu la vallée de l’Ohio : c’était George Washington. Il devait s’emparer de la fourche de l’Ohio, c’est-à-dire du confluent de la rivière des Alleghanys et de la Monongaela[3], qui en se réunissant forment l’Ohio, point où est aujourd’hui Pittsburg, mais où dès lors les Français avaient bâti un fort, appelé fort Duquesne et commandé par M. de Contrecœur.

C’est dans cette vallée que, le 27 mai 1754, Washington, prévenu, dit-on, par les Indiens que les Français voulaient tirer sur le premier Anglais qu’ils verraient, se rencontra, par une nuit pluvieuse, avec un détachement de Français, commandé par M. Villiers de Jumonville, qui venait en parlementaire.

« Feu ! » cria Washington, et il donna l’exemple ; Jumonville fut tué avec dix Français ; vingt et un furent

  1. Bancroft, Amer. Rev., I, 138.
  2. Bancroft, ibid., I, 131.
  3. Ce que nos Canadiens appelaient la rivière Malengueulée.