Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/50

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fille publique : voilà l’œuvre de cet homme dont le règne est la honte de notre pays.

Pour nous chasser de la vallée de l’Ohio, deux hommes clairvoyants, deux amis, Franklin et Pownall, avaient imaginé, chacun de son côté, un projet de confédération entre les colonies. Tous deux complétaient ce projet par l’idée d’une union plus étroite entre l’Angleterre et les plantations. C’est ce dernier point que j’examinerai aujourd’hui, conservant, pour la prochaine leçon, les essais de confédération qui ont préparé les esprits à la révolution et à l’union.

Thomas Pownall, qui fut vice-amiral, gouverneur du Massachusetts et de la Caroline du Sud, et lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Jersey, est aujourd’hui fort oublié. Son livre sur l’Administration des Colonies anglaises a eu cependant cinq éditions de 1768 à 1774. C’était un de ces hommes qu’on n’écoute guère, parce qu’ils avancent sur leur temps, et qu’ils ont trop tôt raison ; c’est le crime que les habiles pardonnent le moins. Rendons justice à ces esprits clairvoyants, nous qui sommes la postérité ; c’est le moyen peut-être d’assurer une meilleure fortune à leurs successeurs.

Pownall, qui avait résidé longtemps en Amérique, et qui aimait les colonies, avait été frappé de ce grand fait qui, aujourd’hui, crève les yeux ; c’est que, depuis la colonisation de l’Amérique, et depuis l’ouverture du commerce avec l’Asie, le grand intérêt qui couvrait et surmontait tous les autres, c’était l’intérêt commercial. La politique de l’avenir était la politique commerciale, et ce qui, pour lui, amenait la crise américaine, c’était