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de connaître le tarif de chaque conscience en un temps où les consciences ne se vendaient pas très-cher, ayant peu de prix ; mais c’était un esprit sage, sans passion, et qui avait pour devise : Quieta non movere. Il ne se sentait nul désir de troubler les colonies et d’affaiblir un admirable marché. À tous les projets des novateurs il répondait par de sages paroles que l’histoire a conservées :

« Je laisserai, disait-il, le projet de taxer les Américains a ceux de mes successeurs qui auront plus de courage que je n’en ai, ou qui seront moins amis du commerce que je ne suis. Durant mon administration, j’ai toujours eu pour principe d’encourager le commerce des colonies américaines en lui laissant la plus grande latitude. Il a été quelquefois nécessaire de fermer les yeux sur quelques irrégularités de leur commerce avec l’Europe ; car en les encourageant à développer leurs affaires avec l’étranger, si les Américains gagnent 500 000 livres sterling, je suis sûr qu’en moins de deux ans la moitié de ce bénéfice entre dans le Trésor de Sa Majesté, par le travail et le produit de ce royaume, une immense quantité de nos marchandises s’exportant aux colonies. Plus le commerce américain grandit au dehors, plus les colonies ont besoin de nos produits. C’est là une façon de les taxer qui s’accorde bien mieux avec leurs constitutions et leurs lois[1]. »

C’était là le langage d’un homme d’État ; c’était aussi celui de Pitt qui ne voulait pas qu’on taxât directement l’Amérique. Mais, ajoutait-il avec une férocité particulière aux amis de la prohibition : « Si l’Amérique s’avisait de fabriquer un bas, ou un clou de fer à cheval,

  1. Hinton, Hist. of the U. S., p. 182.