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Défense d’embarquer des chapeaux, de les charger sur un chariot ou un cheval, avec l’intention de les exporter. Défense d’avoir plus de deux apprentis ; défense de s’établir chapelier avant d’avoir fait sept ans d’apprentissage ; défense d’employer un nègre pour ce grand œuvre des chapeaux[1] ; on trouve là toutes les folies et toutes les niaiseries de la prohibition.

Même jalousie pour les fabriques de fer. En 1750, le Parlement permet d’exporter le fer en gueuse ou en barre, mais il interdit toute forge ou autre engin pour battre ou étirer le fer, ou pour faire de l’acier, sous peine de 200 livres sterling d’amende. Tous ces ateliers sont déclarés common nuisance, en d’autres termes leur existence constitue un délit. Ordre est donné aux gouverneurs de les détruire, sur la déposition de deux témoins, dans les trente jours, sous peine de 500 livres sterling d’amende[2].

Ce n’était pas là seulement la politique des hommes d’État, c’était aussi celle des économistes du temps. Les colonies américaines étaient donc à la fois très-libres et très-esclaves : très-libres politiquement, pour ce qui touchait à leur gouvernement intérieur ; très-esclaves commercialement, pour tout ce qui touchait à leurs intérêts. La jalousie de la métropole les affaiblissait, et, en même temps, les divisait. Elles ne sentirent leur unité nationale que lorsqu’elles se réunirent d’abord pour envahir le Canada, et chasser les Français du

  1. Pitkin, p. 103.
  2. Ibid., p. 92. Il faut dire qu’on ne put jamais exécuter ces actes dans le Massachusetts.