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misère ou le mépris ? Voudrez-vous languir dans la dépendance, et ne devoir qu’à la charité les misérables restes d’une vie que tant de fois vous avez exposée au champ d’honneur ? Si vous en avez la lâcheté, allez braver l’ironie des loyalistes, le mépris des républicains et la pitié du monde ! Allez mourir de faim dans l’oubli le plus affreux. Mais s’il vous reste encore quelque lueur de sentiment, s’il vous reste encore assez de courage pour vous opposer à la tyrannie, sous quelque couleur qu’elle se présente, réveillez-vous, profitez du moment, plus tard tout effort sera vain. Si vous êtes bien pénétrés de votre situation, vous en appellerez de la justice du gouvernement à ses craintes pour lui-même ; quittez le style suppliant de votre dernier mémoire ; défiez-vous de quiconque vous conseille la modération et la patience ; parlez enfin le langage qui vous convient. Confiez à deux ou trois d’entre vous, qui sachent sentir aussi bien qu’écrire, le soin de ce que j’appellerai votre dernière remontrance ; dites ce que le Congrès vous a promis ; dites ce qu’il a fait ; exposez vos longues souffrances, combien peu vous avez demandé, et combien moins encore vous avez obtenu ; dites que le désespoir ne vous portera jamais à aucune action qui pût donner la moindre atteinte à votre honneur, mais qu’il peut vous arracher aux camps. Dites qu’une plaie toujours négligée finit par devenir incurable, et que le plus léger signe d’outrage de la part du Congrès mettra aujourd’hui entre nous et lui la distance des tombeaux ; que le Congrès sache que, quels que soient les événements politiques, l’armée est placée entre deux alternatives. S’il y a paix, la mort seule doit nous séparer de notre épée ; s’il y a guerre, dites que sous les auspices de votre illustre chef vous irez dans des pays inhabités, où vous pourrez à votre tour sourire aux alarmes d’une indigne patrie ; mais dites en même temps au Congrès que, s’il accordait les demandes contenues dans votre dernier mémoire, il serait plus respectable, vous, plus heureux ; que, tant que la guerre continuerait, vous resteriez fidèles à vos drapeaux, et qu’à la paix, vous reti-