Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/440

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sa folie. Heureux les pays où des Parlements peuvent reconnaître leur faute : un roi ne cède pas ; l’amour-propre est en jeu ; on peut être sûr que George III eût été jusqu’au bout, au risque de ruiner son peuple. À ce moment même, il songeait à se retirer à Hanovre, plutôt que de s’humilier devant le Parlement[1].

Le 20 mars 1782 lord North prit sa retraite, avec cette même bonne humeur qui ne l’avait jamais abandonné, et qui prouve chez lui, sous la lourdeur de son corps, une incurable légèreté d’esprit.

Quand il se présenta à la Chambre en habit de cour, lord Surrey se leva en même temps que lui pour parler ; personne ne voulant céder la parole, Fox proposa que lord Surrey parlât le premier. Lord North, avec sa présence d’esprit ordinaire, dit aussitôt : « Je demande la parole pour combattre cette motion, » et la raison qu’il en donna, c’est qu’il n’était plus ministre, et qu’il n’y avait plus d’opposition. Il remercia la Chambre de sa bonté, de son indulgence, et, ajouta-t-il, de sa longue patience.

La séance fut aussitôt levée ; c’était une nuit froide, la neige tombait ; la plupart des membres avaient renvoyé leurs voitures, comptant sur une longue séance. Lord North avait gardé la sienne, par de bonnes raisons. Il passa devant ses ennemis grelottants : « Messieurs, leur dit-il, vous voyez l’avantage d’être dans le secret ; bonsoir ! » Et il rentra tranquillement chez lui, sans aucune émotion.

  1. Lord Mahon, VII, 145.