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royales ; le Parlement n’était pas intervenu. Ces Chartes, fort larges pour la plupart, laissaient aux colonies toute liberté d’administration intérieure, et notamment leur abandonnaient les avantages et les charges du gouvernement. C’était, comme le dit Montesquieu, plus pour étendre son commerce que pour étendre sa domination, que l’Angleterre avait envoyé ces essaims dans le désert ; l’objet principal du gouvernement anglais était d’assurer à la métropole un grand marché de matières premières, tout en lui réservant le monopole du commerce et de l’industrie. Telle était alors la politique coloniale de toute l’Europe, politique désastreuse pour les colonies qu’elle empêchait de travailler, mauvaise pour la métropole dont elle affaiblissait les échanges, cause perpétuelle de jalousie et de guerre entre les grandes puissances du vieux monde, Espagne, Hollande, France et Angleterre. Il semblait que la ruine du voisin fît la fortune de ses rivaux.

L’Angleterre surtout, comme le dit justement Montesquieu[1], « était souverainement jalouse, et s’affligeait plus de la prospérité des autres qu’elle ne jouissait de la sienne. Ses lois, d’ailleurs douces et faciles, étaient si rigides à l’égard du commerce et de la navigation qu’on faisait avec elle, qu’elle semblait ne négocier qu’avec des ennemis. »

Cette jalousie, cette fureur de monopole était poussée si loin que, depuis l’acte de navigation de 1651, renforcé par l’acte 12, Charles II, les gouverneurs colo-

  1. Esprit des Lois, XIX, ch. xxvii.