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Cette affaire émut singulièrement l’impératrice Catherine ; les croiseurs espagnols avaient saisi dans la Méditerranée deux vaisseaux russes qui portaient du grain à la garnison anglaise de Gibraltar. — « Mon commerce, répétait-elle, c’est mon enfant. »

Le 26 février 1780, le ministre russe Panin, ennemi de l’Angleterre, adressa aux cours belligérantes sa fameuse déclaration portant : 1° que le pavillon couvrait la marchandise ; 2° qu’il n’y avait d’articles de contrebande que ceux qui étaient stipulés tels par un traité ; 3° que les neutres ne pouvaient reconnaître qu’un blocus effectif.

Ces principes, aujourd’hui passés dans le droit des gens, étaient nouveaux alors, et en contradiction avec les prétentions exclusives de l’Angleterre ; en 1780, ils devinrent le fondement de la neutralité armée, alliance contractée entre la Russie, la Suède et le Danemark, pour soutenir au besoin par les armes les droits des neutres. La Hollande et la Prusse s’y joignirent plus tard ; l’Espagne et la France acceptèrent le principe ; l’Angleterre se trouva seule contre l’Europe et l’Amérique, décidées toutes deux à maintenir la liberté des mers[1]. C’est le premier bienfait de la révolution américaine, ce n’est pas le moindre.

Au mois d’avril 1780, La Fayette revint de France, où, sur la nouvelle de la guerre, il était retourné au commencement de 1778 pour offrir son bras à son pays. Il apportait une nouvelle qui réjouit singulièrement

  1. Lord Mahon, VII, 45, 46. On ne fit pas grand’chose à l’origine ; Catherine appelait cela la nullité armée.