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dis que le Congrès était à peu près abandonné, l’armée délaissée, et le papier-monnaie grossissant tous les jours et menant le pays à la banqueroute. Tout le poids des affaires restait sur Washington.

Il s’en plaint éloquemment dans une lettre écrite à M. Benjamin Harrison, de Virginie.

« Il me paraît aussi clair que le jour que jamais l’Amérique n’a eu un besoin plus pressant de la sagesse, du patriotisme et de l’énergie de ses enfants ; aussi, si ce n’est pas un juste sujet d’affliction générale, je suis, pour mon compte, vivement et douloureusement préoccupé de voir que, trop touché de leurs intérêts particuliers, un grand nombre des hommes les plus habiles s’est retiré du Congrès, au grand dommage du bien public. Notre système politique peut être comparé au mécanisme d’une horloge, et nous devrions en tirer une leçon. À quoi bon tenir les petites roues en bon état, si on néglige la grande roue, qui est le ressort principal et le premier moteur de toute la machine ?

« Il faudrait que chaque État ne se contentât pas de choisir ses hommes les plus capables, mais qu’il les obligeât de se rendre au Congrès pour y rechercher avec soin les causes qui ont produit tant d’effets fâcheux dans l’armée et dans le pays. Je voudrais, en un mot, qu’on réformât les abus publics. Si cela n’a pas lieu, il n’est pas besoin d’être prophète pour prédire les conséquences de l’administration actuelle, pour annoncer que tout le travail que font les États en composant des commissions, en préparant des lois, en confiant les emplois à leurs plus habiles citoyens, n’aboutira pas à grand’chose. Si l’ensemble est mal dirigé, tous les détails périront dans le naufrage général ; nous aurons la honte de nous être perdus par notre propre folie et par notre négligence, ou peut-être par le désir de vivre à l’aise et tranquilles, en attendant la fin d’une si grande révolution ; tandis que les hommes les plus