Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/409

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pérât cette confiance trop vive, en prévenant le peuple et l’armée : qu’il fallait s’attendre encore à de rudes épreuves ; que l’alliance française assurait l’indépendance, mais qu’elle ne mettait pas l’Amérique à l’abri des dévastations de l’ennemi.

L’avis était sage ; mais le peuple, qui dans sa foi naïve devançait les événements, ne se trompait pas. Avec l’appui de la France, il était sauvé.

Ce sont là, Messieurs, de grands et beaux souvenirs pour nous, des souvenirs qu’il ne faut pas laisser perdre. Nos histoires sont pleines de guerres avec l’étranger, de haines et de violences séculaires : cela entretient chez nous un patriotisme ombrageux, qui a son bon et son mauvais côté ; mais il y a aussi des pages qui, sans nous rendre moins patriotes, nous laissent de plus douces émotions. Plus d’une fois la France a été au dehors, sans autre intérêt que de servir l’indépendance d’un peuple opprimé. La Grèce, l’Italie, l’Amérique, ont vu nos soldats arriver et sortir en amis ; ce sont là nos trophées les plus glorieux et les plus purs ; ne les perdons pas.

Voilà pourquoi, aujourd’hui que l’Amérique souffre, je réveille ce passé qu’on laisse dans la poudre. On nous aime toujours là-bas, on a besoin de nous, nous pouvons encore être utiles, ne fût-ce que par le poids de l’opinion. Reconnaissons d’anciens et fidèles amis, tendons-leur la main.

Autrefois, dans l’antiquité, une coutume touchante établissait l’hospitalité : une tessera, un médaillon de terre portant la tête de Jupiter hospitalier, était cassé en