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que les contemporains sentaient si peu qu’ils avaient au milieu d’eux un grand homme ; c’est une justice à rendre au jeune La Fayette, qu’il n’en douta jamais ; toutes ses lettres respirent la joie de vivre auprès d’un grand et excellent homme ; il n’y a chez lui ni envie, ni faiblesse, rien que l’admiration et l’amour. C’est là peut-être son plus beau titre à l’estime de l’Amérique et de la postérité.

Les événements d’Amérique eurent leur contre-coup sur le continent.

Le 20 novembre 1777, le roi ouvrit le Parlement en personne, et demanda de nouveaux moyens d’écraser la rébellion. On ignorait la reddition de Burgoyne, mais on connaissait ses embarras.

Lord Chatham reparut sur la brèche. Sa politique se résumait en un point : maintenir l’union de l’Angleterre et des colonies, seul moyen d’abaisser la France ; à ce prix tout céder à l’Amérique, lui reconnaître tous les droits qu’elle réclamait, hormis l’indépendance, et rappeler les troupes du nouveau continent. Lord Rockingham et ses amis pensaient qu’il était trop tard, et que reconnaître l’indépendance était une nécessité. C’était une dure vérité qu’ils n’osaient encore proclamer publiquement. Ce fut donc Chatham qui soutint tout le poids de la discussion de l’Adresse.

Entre autres parties de son discours, il y eut une phrase où il parla « des souffrances, et peut-être de la perte totale de l’armée du Nord, » phrase prophétique, qui fit une sensation profonde quand, dix jours plus tard, on apprit le désastre de Saratoga.