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je suis heureux de vous voir. » Burgoyne, plus homme d’esprit que soldat, répondit : « Je le crois, général, car la fortune de la guerre est toute pour vous. »

Les soldats Américains se conduisirent avec une convenance qui toucha les vaincus. Burgoyne lui-même raconte qu’après la Convention (nom adouci pour la capitulation), une des premières personnes qu’il vit fut le général Schuyler. Il possédait à Saratoga des scieries et des magasins qui valaient au moins 10 000 livres sterling, et que Burgoyne avait fait brûler, parce qu’ils gênaient sa défense.

« Je lui exprimai mes regrets, dit Burgoyne, et lui expliquai les raisons qui m’avaient fait agir. Il me pria de n’y plus penser, ajoutant que les circonstances me justifiaient, suivant les principes et les règles de la guerre, et qu’en même occasion il aurait fait la même chose. Il fit plus, il chargea un de ses aides de camp de me conduire à Albany pour me procurer, disait-il, un meilleur logement que n’en trouverait un étranger. L’aide de camp me conduisit à une maison élégante, et, à ma grande surprise, me présenta à madame Schuyler et à sa famille. Durant tout mon séjour à Albany, je restai chez le général avec une table de vingt couverts pour moi et mes amis, et toutes les démonstrations d’hospitalité possibles[1]. »

Le marquis de Chastelleux, qui en 1780 fît un voyage en Amérique, ne fait pas une peinture moins aimable de Schuyler et de sa famille, mais il ajoute la réflexion suivante, qui est bien d’un bel esprit du dix-huitième siècle :

  1. Lord Mahon, VI, 197.