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de vos ministres ? Ont-ils cherché à se concilier l’affection et l’obéissance de leurs frères d’Amérique ? Ils ont été en Allemagne, ils ont cherché l’alliance et le secours de tout ce qu’ils ont trouvé de misérable, de mendiant, d’insignifiant parmi les petits princes allemands, afin de couper la gorge à nos frères d’Amérique, à un peuple loyal, brave, outragé. Ils ont fait des traités mercenaires avec ces bouchers humains ; on a vendu et acheté le sang des hommes.

« Mais, mylords, ce n’est pas tout ; vos ministres ont négocié d’autres traités. Ils ont déchaîné les sauvages d’Amérique sur leurs frères innocents et sans défense, ils les ont lâchés sur l’âge et la faiblesse ; des vieillards, des femmes, des enfants, des enfants au sein de leur mère ont été égorgés, coupés en morceaux, bouillis, rôtis, mangés vivants. Je n’exagère rien ; voilà l’œuvre de vos ministres. Voilà, mylords, quels sont aujourd’hui les alliés de la Grande-Bretagne ; le carnage, la désolation, la destruction suivent partout nos armes ; voilà comment, aujourd’hui, nous faisons la guerre.

« Victorieuses ou vaincues, les armes de ce pays sont déshonorées. Est-ce ainsi qu’autrefois nous agissions ? Est-ce par de semblables moyens que nous sommes parvenus à ce faîte de grandeur et de gloire qui, en portant notre réputation dans tous les coins du globe, rendait témoignage à notre justice, à notre pitié, à notre intégrité nationale ? Est-ce en se servant du tomahawk et du scalpel que la valeur et l’humanité britannique étaient devenues proverbiales ? Est-ce ainsi que nos triomphes mêmes et l’éclat de nos conquêtes pâlissaient à côté de l’honneur national ? Est-ce en déchaînant des sauvages, pour qu’ils plongent leurs mains dans le sang de nos ennemis, que nous avions uni ensemble les devoirs du soldat, du citoyen et de l’homme ? Est-ce là une guerre honorable ? Est-ce là cette grandeur et cette générosité qui fait de l’ambition une vertu[1] ? »

  1. Hazlitt, Eloq. of the british Senate, I, 173.