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rique a commencé d’occuper l’attention de la France. Joignez-y les articles de Voltaire sur Penn et les Quakers, vous aurez à peu près tout ce que nos grands écrivains du dix-huitième siècle nous ont laissé sur les Anglo-Américains. C’est peu de chose ; mais, en France, sous le règne de Louis XV, en un temps où l’on se croyait parvenu à l’apogée de la philosophie, des lumières et de la civilisation, il fallait l’esprit curieux, la vive intelligence d’un Montesquieu pour deviner l’avénement d’un grand peuple, et pour admirer cet empire qui commençait au fond des bois.

Ces colons inconnus avaient pourtant résolu le plus grand problème de la politique moderne, et de la façon qui convenait le mieux à un peuple amoureux de l’égalité. Ils avaient porté dans le désert des sociétés libres et florissantes. Leur gouvernement était celui de la mère patrie, mais sans privilèges et sans abus ; ce qui, en Angleterre, était un composé féodal, monarchique et libéral, était en Amérique une république, révolution facile à expliquer par l’absence de royauté, de noblesse et de clergé, mais que Montesquieu ne semble pas avoir entrevue.

Les libertés individuelles étaient aussi grandes et mieux garanties qu’en Angleterre ; la liberté politique était complète. Le droit électoral était universel et également réparti. Il n’y avait ni villes sans représentation, ni représentation sans villes, comme étaient, jusqu’en 1832, les bourgs pourris. Dans les colonies de l’Est, qui contenaient plus de la moitié de la population totale, l’Assemblée législative était élue annuellement au scrutin