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campagne de 1776, décidèrent un certain nombre de personnes, à New-York surtout, à reconnaître le gouvernement anglais et le pouvoir du Parlement. Parmi ces transfuges, un nom est remarquable, c’est celui de Joseph Galloway, qui, en 1774, avait été envoyé au Congrès par la Pensylvanie.

Dans une guerre civile, il n’y a point de place pour les neutres ; Solon avait raison d’exiger qu’en ce cas chacun prît parti ; l’Amérique se partagea en deux camps : les patriotes, c’était l’immense majorité, et les tories ou partisans de l’obéissance, les amis de la Grande-Bretagne. Ce fut de part et d’autre une haine violente. Certes, il n’y a pas d’âme plus belle et plus humaine que Washington ; à la veille de la bataille de Long-Island, nous le voyons préoccupé de faire sortir de New-York les femmes et les enfants, et de trouver des secours pour les vieillards, les malades, les pauvres gens sans travail[1], mais Washington ne pardonna jamais aux tories, et ne se fit jamais scrupule de saisir leurs biens et leurs personnes. On peut juger par là quelle était l’animosité d’un peuple poussé au désespoir. Les Américains avaient à la bouche le mot de Cosme de Médicis : « Dieu nous ordonne de pardonner à nos ennemis, il ne dit rien de nos amis[2]. » Il est permis de croire qu’on allait trop loin.

Les négociations avaient retardé, mais non pas arrêté les opérations militaires. Le 14 septembre, l’armée anglaise, avec l’assistance de la flotte, passa l’East-

  1. Lettre du 17 août 1770.
  2. Lord Mahon, VI, 88.