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magistrat envoyer contre nous, non-seulement des soldats de notre sang, mais des Écossais et des mercenaires étrangers. Ces actes ont donné le dernier coup à notre affection mourante ; le cœur nous dit de renier à jamais ces frères insensibles. Nous essayerons d’oublier notre ancien amour, et de les considérer comme le reste des hommes, ennemis en guerre, amis en paix.

« Nous aurions pu former ensemble un peuple libre et grand, mais il paraît que le partage de la grandeur et de la liberté est au-dessous de la fierté anglaise. Qu’il en soit donc ainsi qu’ils l’ont voulu ; la route du bonheur et de la gloire nous est aussi ouverte ; nous y marcherons à part, nous acceptons la nécessité qui nous annonce une éternelle séparation. »

Le paragraphe retranché concernait la traite des nègres et l’esclavage. Il fut retranché, nous dit Jefferson dans ses Mémoires, pour plaire à la Géorgie et à la Caroline du Sud, qui n’avaient jamais voulu suspendre l’importation, et qui entendaient la continuer. « Quant à nos frères du Nord, ajoute Jefferson, ils furent aussi blessés de ma censure ; car, encore bien qu’ils eussent très-peu d’esclaves parmi eux, ils en étaient grands marchands pour les autres. »

Ce paragraphe était ainsi conçu :

« Le roi a déclaré une cruelle guerre à la nature humaine, il a violé les droits sacrés de la vie et de la liberté dans la personne d’un peuple lointain qui ne l’a jamais offensé. Ces hommes innocents, il les a réduits en captivité, il les a transportés dans un autre hémisphère pour y être esclaves, ou pour périr misérablement dans la traversée. Cette conduite de pirate, l’opprobre des puissances infidèles, est la conduite du roi chrétien de la Grande-Bretagne. Décidé à tenir ouvert un