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Aujourd’hui, quand on lit ce pamphlet fameux, on est un peu désappointé. La Révolution nous a blasés.

Paine commence par dire qu’on a tort de confondre la société et la souveraineté, il a raison ; mais il a tort quand il ajoute que la société a été produite par nos besoins, et le gouvernement par notre méchanceté, la première est une mère, la seconde un bourreau ; par conséquent, le meilleur gouvernement n’est qu’un mal nécessaire. Le gouvernement, comme les habits, est la marque de l’innocence perdue ; les palais des rois sont bâtis sur les ruines des bosquets du paradis.

Paine combat la royauté par le droit naturel et par la Bible ; pour lui, la monarchie est au gouvernement ce que le papisme est à la religion, et il combat la royauté par l’éternel argument des dangers auxquels l’enfance, la vieillesse, la maladie, la faiblesse, l’ignorance, les passions des souverains exposent un pays.

« Mais, continue-t-il, où est le roi d’Amérique ? demanderont quelques personnes. Mes amis, il est au ciel, et ne s’amuse point à faire entre-tuer les hommes comme la royale brute de la Grande-Bretagne. Et, pour qu’il ne nous manque rien des pompes de la terre, fixons un jour solennel où nous proclamerons notre Constitution ; qu’on apporte la Charte, placée sur la loi

    note trouvée dans ses papiers : « Demander que Thomas Paine soit décrété d’accusation pour l’intérêt de l’Amérique autant que de la France. » Paine fut incarcéré au Luxembourg, d’où il ne sortit qu’après le 9 thermidor. Son suppléant à la Convention fut Joseph Lebon. « Quand j’ai été mis en prison, disait Paine, il a pris ma place à la Convention ; quand je suis rentré à la Convention, il a pris ma place dans la même prison et a été guillotiné à ma place. Il a été mon suppléant jusqu’au bout. »