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c’est refuser d’être un grand peuple, un peuple libre, pieux et heureux[1]. »

Ce fut à ce moment qu’un Anglais établi depuis peu en Amérique, Thomas Paine, rédacteur du Magasin de Pensylvanie, et ami de Franklin, qui l’avait introduit dans les colonies, publia en faveur de la séparation un pamphlet anonyme intitulé le Sens commun. Paine, qui avait commencé par être quaker, avait fait tous les métiers : il avait été marchand, marin, douanier, maître d’école, poëte, et en ce moment il était journaliste. C’était un homme de peu de consistance ; mais son pamphlet anonyme, attribué tour à tour à Franklin, à Samuel et à John Adams, eut un succès inouï et une influence si grande, que plus tard le Congrès se crut obligé d’en récompenser l’auteur. Longtemps après, en l’année 1783, Washington appelait Paine auprès de lui comme un homme dont l’Amérique ne pouvait trop reconnaître les services. L’Europe, et en particulier la France, ne firent pas un accueil moins favorable à cet écrit ; le nom de Paine devint si populaire, surtout après qu’il eut publié les Droits de l’Homme (1791), en réponse aux attaques de Burke contre la Révolution française, que, tout étranger qu’il fût, il fut envoyé comme député à la Convention par le département du Pas-de-Calais[2].

  1. Pitkin, I, 360 ; — lord Mahon, VI, 98.
  2. Paine s’honora en refusant de voler la mort de Louis XVI : 1° parce que les crimes de Louis XVI étaient ceux du roi et non de l’homme ; 2° parce que Robespierre avait demandé l’abolition de la peine de mort ; 3° parce que Louis XVI avait affranchi l’Amérique. Robespierre se vengea de cet argument ad hominem par cette petite