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Si ces maximes féroces se trouvaient dans la bouche d’un jacobin, aurait-on assez de malédictions pour les flétrir ? Sont-elles innocentes sur les lèvres d’un ministre royal ?

Et quand on opposait au ministère que les Américains, repoussés par la métropole et livrés en proie à des mercenaires, pourraient, eux aussi, s’adresser aux puissances étrangères, non pas seulement pour leur emprunter quelques bandes de soldats, mais pour solliciter l’appui de quelque grande nation, heureuse de rendre à l’Angleterre le mal qu’elle en aurait reçu autrefois ; le ministère repoussait cette supposition comme étant ridicule, « Comment imaginer que l’Espagne ou la France donneraient à leurs colonies le dangereux exemple d’encourager la révolte ? Rien ne devait plus les effrayer que le voisinage d’un empire indépendant, qui maîtriserait un jour le continent tout entier. »

La seconde raison était sérieuse, M. de Vergennes le sentait ; la première ne l’était pas, car ni la France ni l’Espagne n’avaient de querelles avec leurs colonies, et c’était mal calculer que de croire qu’en 1776 elles eussent oublié cette guerre, terminée en 1763, qui les avaient humiliées en Amérique, chassant l’Espagne des Florides, les Français du Canada. Il y avait là une revanche à prendre, trop tentante pour que la France n’en eût pas le goût, et cela ne manqua pas.

Une fois ces lois votées, il fallut nommer un commandant des forces royales. Suivant l’usage, on offrit le commandement au plus ancien des officiers généraux.