Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/306

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ruine et l’esclavage de l’Angleterre aussi bien que des colonies persécutées.

« Nous espérons sincèrement que le grand Souverain de l’univers, qui tant de fois a soutenu l’Angleterre, vous aidera à nous sauver de la ruine ; et qu’unis à la mère patrie par un lien constitutionnel, nous ferons bientôt tous ensemble un peuple libre et heureux[1]. »

Ce fut là un nouveau trait de la résistance. De toutes parts, dans la chaire, le barreau, la presse, on distingua le roi de ses ministres. Le roi ne pouvait mal faire ; c’est le ministère qu’on accusait de trahison ; il abusait du nom royal, disait-on, afin de couvrir des mesures inconstitutionnelles. Le mot guerre ministérielle devint commun ; c’était le moyen de concilier l’allégeance et le refus d’obéissance[2].

Vaine fiction, dira-t-on, que cette responsabilité ministérielle. Non, ce n’est pas une fiction ; c’est l’essence même de la liberté constitutionnelle. Un peuple fait lui-même ses affaires, et se donne ainsi le moyen de changer sans trouble son gouvernement. Vaut-il mieux faire une révolution ?

Le 10 mai 1775, le jour même où fut pris le fort Ticonderoga, le Congrès nouveau se réunit à Philadelphie. Dès le commencement de l’année, lord Darmouth avait adressé une circulaire aux gouverneurs des colonies, pour leur enjoindre d’empêcher, s’il était possible, l’élection de délégués à un Congrès si désagréable au roi. Mais, malgré cette défense, l’élection se fit sans

  1. Pitkin, I, 327.
  2. Ramsay, Amer. Rev., I, 197.