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rance, tandis que notre ennemi nous tiendra pieds et poings liés ? Non, nous ne sommes pas faibles si nous savons user des ressources que Dieu et la nature ont mises en notre pouvoir.

« Un peuple de trois millions d’âmes, un peuple armé pour la sainte cause de la liberté et dans un pays comme le nôtre, est invincible ; il défie toutes les armées que l’Angleterre peut envoyer contre lui. D’ailleurs, nous ne sommes pas seuls. Il y a un Dieu juste qui préside aux destinées des nations ; il suscitera des amis pour combattre nos batailles. La victoire n’appartient pas seulement à la force, elle appartient aussi à la vigilance, à l’activité, à la bravoure. Enfin, nous n’avons pas le choix. Pour nous retirer de la lutte il est trop tard, quand même nous aurions la lâcheté de la déserter. Il n’y a plus de retraite pour nous que dans la soumission et l’esclavage ! Nos chaînes sont forgées ! On en entend le bruit dans les plaines de Boston ! La guerre est inévitable. Qu’elle vienne donc, je le répète, qu’elle vienne !

« À quoi bon affaiblir les choses. On peut crier : la paix ! la paix ! — Il n’y a plus de paix. La guerre est commencée. La première brise qui soufflera du Nord apportera à nos oreilles le bruit des armes. Nos frères sont déjà en campagne. Que faisons-nous ici à rester oisifs ? qu’est-ce que désirent ces messieurs ? qu’est-ce qu’ils veulent ? La vie est-elle si chère, la paix est-elle si douce qu’il faille l’acheter au prix des fers et de la servitude ? Que le Dieu tout-puissant nous en préserve ! Je ne sais pas ce que feront les autres, mais pour moi donnez-moi la liberté, ou donnez-moi la mort[1]. »

Personne n’applaudit, on était trop ému ; les cœurs étaient gagnés par cette mâle éloquence ; les résolutions furent votées. Patrick Henry entra dans le comité de

  1. Wirt, Life of Patrick Henry, p. 93.