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au fond. C’était une image de la métropole. Partout un gouverneur, un Conseil, une Chambre de représentants, c’est-à-dire une ombre du système anglais : roi, lords, communes ; et le modèle futur de l’organisation fédérale : président, sénat, assemblée de représentants.

Mais on sent quelle différence énorme il y avait entre un roi héréditaire et un gouverneur temporaire sans privilèges, sans liste civile, sans armée, entre une aristocratie princière et quelques conseillers ; c’était la même forme, mais le fond était tout différent. Cette forme qui couvrait une aristocratie en Angleterre, couvrait en Amérique une démocratie.

C’est ce qu’a senti un des derniers gouverneurs royaux du Massachusetts, Hutchinson[1].

« Il ne serait pas aisé d’imaginer un gouvernement subordonné qui fût moins contrôlé par le gouvernement suprême que ne l’étaient les gouvernements des colonies. On avait laissé chaque colonie faire ses propres lois, et les adapter au génie du peuple et aux circonstances locales. Le Massachusetts, en particulier, était régi par des lois toutes différentes des lois anglaises, sans toutefois leur être contraires.

« Non-seulement les lois pénales, la façon d’administrer la justice, la loi de succession différaient de la Constitution anglaise et avaient été réglées au gré des colons ; mais on leur avait permis d’établir un culte, une discipline, une Église qu’on tolère à peine en Angleterre. »

En d’autres termes, le germe démocratique qui, en Angleterre, est étouffé par l’aristocratie héréditaire,

  1. Hinton, p. 181.