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était un gentilhomme vivant au milieu de ses vastes domaines, entouré de ses noirs et de ses engagés ; au Nord, c’était un cultivateur qui travaillait de ses mains, sans avoir rien à attendre ni à craindre de personne.

Maître de son domaine, indépendant par sa situation, le colon pouvait vivre à sa guise, chasser, pêcher, cultiver à sa façon. Il n’y avait là ni dîmes, ni champarts, ni ces terribles privilèges de chasse qui, en France, jusqu’en 1789, ont peuplé les galères de criminels imaginaires ; qui, en Angleterre aujourd’hui, quoique fort adoucis, gênent encore la culture, sinon la propriété.

Non-seulement le colon était libre, mais tout lui faisait sentir sa liberté. Ses besoins étaient peu nombreux, et c’est de son travail seul qu’il en attendait la satisfaction. La terre lui donnait son linge, ses habits, sa nourriture, ses plaisirs. L’argent était rare. Les villes étaient peu peuplées ; les marchands et ouvriers ne faisaient pas le quinzième de la population. C’était un peuple de propriétaires, c’est-à-dire un peuple qui, forcément, avait les habitudes et le goût de la liberté.

La forme du gouvernement ajoutait à cet esprit d’indépendance. Toutes ces colonies s’étaient établies, par elles-mêmes, sans l’appui du Gouvernement ; la liberté était sortie soit d’une simple Charte de Compagnie, soit d’une concession royale, d’autant plus large que le roi se souciait moins de ces déserts inconnus.

Faire l’histoire de ces Constitutions serait chose inutile. Avec quelques différences, toutes se ressemblaient