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Il y avait enfin cette phrase significative : « Les colons, disent-ils, n’ont point été taxés dans les premiers temps ; qu’est-ce que cela prouve ? Nous ne mettons pas le veau à la charrue ; nous attendons qu’il soit bœuf. » — Cette phrase fut retranchée ; « les ministres n’en ont pas voulu, disait Johnson ; comme critiques ils l’ont trouvée trop facétieuse, comme politiques ils l’ont trouvée un peu vive. »

Les ministres n’étaient cependant pas difficiles, car ils laissaient passer les menaces suivantes :

« Les Américains se vantent de multiplier avec la fécondité de leurs serpents à sonnettes ; raison de plus pour que ceux qui se sentent les maîtres réduisent l’obstination avant qu’elle soit envieillie. Quand l’Amérique sera plus peuplée que l’Europe, dans un siècle et quart, il sera temps pour les princes de la terre de trembler dans leurs palais[1]. »

On peut juger de l’aménité du docteur par un détail que nous a conservé son biographe Boswell.

« Je peux, disait-il, aimer tous les hommes excepté les Américains. Et à ces mots, il s’écriait : « Drôles, voleurs, pirates, je voudrais vous brûler tous. » Miss Seward, le regardant avec étonnement, lui dit avec autant de douceur que de fermeté : « Ceci, monsieur, est une preuve que nous ne pardonnons pas nos offenses à ceux que nous avons offensés. » Ce reproche délicat et poignant nous valut un tonnerre de malédictions qu’on eût entendu de l’autre côté de l’Atlantique. »

C’est à ce moment que Franklin quitta l’Angleterre ;

  1. Bancroft, Amer. Rev., IV, 259.