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« Si les ministres persévèrent à mal conseiller le roi et à l’égarer, je ne dirai pas que le roi est trahi, mais j’affirme que le royaume est perdu. Je ne dis pas que les ministres détruiront l’affection que les sujets portent à la Couronne, mais j’affirme que, quand ce diamant de l’Amérique n’y sera plus, la Couronne ne vaudra pas la peine de la porter[1]. »

Chatham fut soutenu par lord Cambden, l’ancien lord chancelier, l’homme de la justice et du droit.

« Mylords, dit-il, ce n’est pas comme politique, homme d’État ou philosophe que je vous parle, c’est comme simple légiste. Vous n’avez pas le droit de taxer l’Amérique ; les droits naturels de l’homme, les lois immuables de la nature sont avec ce peuple. Rois, lords, communes sont de beaux noms et qui sonnent bien, mais les rois, les lords et les communes peuvent devenir tyrans tout comme d’autres. Il est aussi légal de résister à la tyrannie de plusieurs qu’à la tyrannie d’un seul. On demanda un jour au grand Selden dans quel livre se trouvait le droit de résistance à la tyrannie, « Ce fut « toujours la coutume d’Angleterre, répondit Selden, et la « coutume d’Angleterre est la loi du pays. »

Dans ces simples et fortes paroles de Cambden, il y avait plus de raison que dans tous les in-folio des jurisconsultes, et plus de sagesse que dans tous les discours ministériels.

Avoir raison contre Chatham et Cambden était chose difficile ; mais leur répondre était aisé ; il y a des sophismes parlementaires toujours prêts pour toutes les questions, et quand une assemblée est ignorante, passionnée ou corrompue, ces sophismes réussissent d’au-

  1. Bancroft, Amer. Rev., IV, 200.