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amis, et en 1772 nous le voyons engagé dans une Compagnie qui voulait s’établir sur le territoire de l’Ohio.

En un mot, c’était un de ces hommes qui, en faisant les affaires de la république, ne négligent point de faire les leurs ; ils savent tenir une ligne parfaite entre leur devoir et leur intérêt. Mais comme le nombre de ceux qui maintiennent cet heureux équilibre est peu nombreux, et qu’en général on penche plus de son côté que de celui du public, l’opinion a quelque peine à croire, je ne dirai pas à l’honnêteté, mais à la délicatesse de ces heureux mortels. C’est pourquoi Franklin a laissé la réputation d’un habile homme plus que d’un grand homme ; et cependant il est vrai de dire que personne n’a servi son pays avec plus de talent, d’honnêteté, de courage et de dévouement. Le monde a-t-il tort d’être soupçonneux ? Trop d’exemples l’excusent pour que j’ose le blâmer. Franklin était une exception, je l’affirme ; mais les exceptions sont si rares, que le monde fera bien de garder ses scrupules ; il n’aura que trop d’occasions de s’en applaudir.

Dans son long séjour en Angleterre, Franklin s’était lié avec les hommes distingués du temps : avec Barré, Conway, Hume, lord Kames, etc., etc. Personne ne s’entendait mieux que lui à ménager les hommes, on le vit bien à Paris, dans sa résidence à Passy. Il avait contribué à renverser lord Hillsborough et à faire arriver lord Darmouth. Quoique en Angleterre il ne fût qu’un chétif personnage, il s’était servi de la presse de façon à mettre les gens d’esprit de son côté.

Nul mieux que Franklin n’a su se servir de l’impri-