Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/167

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

excusera donc, si nous lui déclarons en termes exprès que, fidèles à notre honneur, à notre intérêt, à notre devoir envers nos mandataires, nous ne voterons jamais ce que nous demande son message[1]. » Voter l’impôt quand on n’en peut décider l’emploi, c’est mettre son nom au bas d’une dépense faite et d’une recette à faire ; mais où est la garantie de la propriété des citoyens, où est le droit des mandataires et des mandants ?

C’est à ce moment que le gouverneur Bernard informa l’assemblée qu’il était mandé en Angleterre par le roi, pour lui exposer la situation de la colonie. L’assemblée adressa aussitôt une pétition au roi pour que cette mission du gouverneur fût un véritable rappel. Parmi les griefs énoncés, l’assemblée déclara que Bernard avait voulu renverser la Charte coloniale et dépouiller la plantation de ses droits. Des lettres confidentielles de Bernard aux ministres avaient été soumises au Parlement anglais ; les planteurs en avaient eu copie. Il n’est pas douteux que Bernard voulait transformer les colonies, et en faire tout autre chose qu’un pays libre. Bernard fut remplacé par Hutchinson.

À son arrivée en Angleterre, le roi reçut Bernard et le nomma baronet. Il avait échoué dans son administration un peu par la faute des événements, et beaucoup par la sienne ; on le récompensa pour montrer qu’on ne cédait pas. C’est une des plus sottes prétentions du pouvoir, que de se croire infaillible. Combien de gens ont

  1. Bancroft, Amer. Rev., III, 320.