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fifre et la trompette, même le jour du Seigneur. L’ordre public ne fut pas troublé, mais la colère était dans tous les cœurs.

Ce fut alors que, reprenant une idée déjà en cours d’exécution avant le rappel de l’acte du timbre, les Américains prirent entre eux des engagements de non-importation. Puisque l’Angleterre abusait de sa puissance pour grever les colons, il fallait exclure son commerce des colonies et ne plus porter que des étoffes de fabrique américaine. On prendrait ainsi les Anglais par leur endroit sensible ; on les réduirait par la famine. « Nous ne dépendons pas de l’Angleterre, disait-on, c’est l’Angleterre qui dépend de nous pour son commerce. Nous avons un continent à peupler, l’Angleterre n’est qu’un point sur la carte[1]. » À compter de ce jour, les fils de la liberté n’eurent plus que des habits grossiers et renoncèrent à l’usage du thé ; les filles de la liberté, encouragées et soutenues par l’opinion (le sacrifice était plus grand), renoncèrent aux robes de soie et aux rubans.

« Que nous trouverons ce sexe charmant dans sa beauté naturelle, disait un journal de Boston, lorsqu’un sublime patriotisme fera toute sa parure[2]. »

Ce n’est pas une des moindres différences des révolutions américaine et française, que l’ardeur avec laquelle les femmes américaines épousèrent la cause de la liberté.

Bernard appelait ces engagements les derniers efforts

  1. Ramsay, Amer. Rev., I, 75.
  2. Appendice aux Lettres d’un fermier, p. 215.