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ville, qui ne perdait pas une occasion de rappeler l’ingratitude et l’entêtement des Américains, et qui accusait le Parlement et le ministère de faiblesse et de lâcheté, reproche coutumier de l’opposition et qui en tout pays a fait faire aux ministres plus d’une folie.

— Vous êtes des lâches, disait Grenville aux ministres ; vous avez peur des Américains ; vous n’osez pas taxer l’Amérique.

— Nous, des lâches, s’écrie Townshend. Vous verrez si j’oserai.

C’est de cette façon qu’on affole les esprits faibles. Il avait suffi d’un reproche de lâcheté pour que Charles IX consentît au crime de la Saint-Barthélémy. Townshend n’était ni moins léger ni moins emporté. Par malheur, la Chambre accueillit ces paroles avec une faveur qui ferma la bouche à Conway, et entraîna l’adhésion du ministère. Chatham était absent ; il eût fallu faire sortir Townshend du cabinet ; personne ne se sentit cette autorité. On s’engagea à la légère dans une voie dont on ne soupçonnait pas le danger[1].

Cette promesse téméraire, Townshend voulut la tenir. Il proposa à la Chambre d’établir des taxes peu considérables sur le verre à vitre, le papier, les couleurs et le thé ; ces taxes devaient être payées comme droit d’entrée, et, suivant le calcul du ministre, devaient rapporter 40 000 livres sterling (un million) par an[2].

Le préambule de la loi déclarait : « Qu’il était à propos de lever un revenu en Amérique, afin d’avoir des moyens

  1. Mahon, t. V, p. 362. Extrait des Mémoires du duc de Grafton.
  2. 20 000 livres seulement, suivant Ramsay. Amer. Rev., I, 75.