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Peuple ingrat d’Amérique !… Quand j’avais l’honneur de servir la couronne, nous, chargés d’une énorme dette, nous leur avons donné des primes sur leurs bois, leur fer, leur chanvre et le reste. Nous avons abandonné en leur faveur l’acte de navigation, ce palladium du commerce britannique, et cependant je suis injurié dans tous les journaux comme un ennemi du commerce américain[1]. »

Pitt se leva pour répondre :

« On m’accuse, dit-il, d’avoir donné naissance à la sédition en Amérique. Les colons ont librement exprimé leur opinion sur un Acte malheureux ; cette liberté est devenue leur crime. Je suis fâché d’entendre dénoncer comme un crime la liberté de parole dans cette Chambre. Mais cette imputation ne me décourage pas. C’est une liberté que j’entends exercer. Personne ne doit s’effrayer de l’exercer. C’est une liberté dont aurait pu profiter celui qui la calomnie. Il aurait dû en profiter. Il aurait dû abandonner son projet.

« On nous dit que l’Amérique est en état de rébellion ouverte. Je me réjouis que l’Amérique résiste. Trois millions d’hommes, si bien morts à tout sentiment de liberté qu’ils se résignent à devenir esclaves, seraient des instruments faits pour asservir tout le reste.

« Pour défendre la liberté, je ne viens point ici armé de toutes pièces, avec des précédents et des actes du Parlement, avec le livre des Statuts relié en parchemin… Il me serait trop aisé de montrer que, même sous des rois arbitraires, le Parlement a rougi de taxer le peuple sans son consentement, et lui a accordé des représentants… Le pays de Galles n’a jamais été taxé par le Parlement jusqu’à ce qu’il ait été incorporé.

« Mais je ne veux pas discuter un point de droit particulier avec l’orateur ; je connais son talent ; j’ai été éclairé par ses recherches.

  1. Pitkin, I, 207.