Page:Laboulaye - Histoire politique des États-Unis, tome 2.djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Si vous acceptez, dit-il, le projet de composer un congrès de députés pris parmi les différentes colonies anglaises, quel plat singulier vous allez faire ! La Nouvelle-Angleterre y mettra du poisson et des oignons ; les colonies du centre y mettront de la graine de lin et de la farine ; le Maryland et la Virginie y ajouteront du tabac ; la Caroline du Nord, de la poix, du goudron et de la térébenthine ; la Caroline du Sud, du riz et de l’indigo ; la Géorgie saupoudrera le tout de sciure de bois. Voilà le mélange absurde que vous ferez avec des éléments aussi hétérogènes que les treize colonies anglaises. »

Un membre campagnard, qui n’était point sot, répondit qu’assurément il ne prendrait pas pour cuisinier le gentleman qui raisonnait avec tant d’esprit, mais que néanmoins il ne craignait pas d’assurer que, si les colonies choisissaient judicieusement les délégués du congrès, elles apprêteraient un plat qui ne serait pas indigne des têtes couronnées de l’Europe[1].

Après une discussion animée où se montra John Rutledge, qui devait jouer un rôle dans la révolution, l’assemblée, entraînée par un patriote, Christophe Gadsden, accepta la proposition à une faible majorité. L’exemple de la Caroline décida le sort de l’Union.

De toutes parts on nomma des commissaires pour se réunir à New-York, et à ces commissaires on donna des instructions rédigées, pour la plupart, en termes énergiques, véritables programmes de liberté.

Parmi ces instructions, il en est une qui est restée célèbre : c’est celle que la petite ville de Plymouth donna au représentant qu’elle envoyait à l’assemblée

  1. Ramsay, Hist. de la Carol. mérid., I, 15.