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s’exécutera de soi-même[1]. » — « Les larmes me soulagent, » écrivait Otis, imagination ardente, facile à accabler comme à se redresser. Et il ajoutait : « Le devoir de tous est de se soumettre humblement et silencieusement aux décisions de la suprême législature. Sur mille colons, il y en a neuf cent quatre-vingt-dix-neuf qui n’auront jamais d’autre pensée que de se soumettre en tout et pour tout au roi et à l’autorité du Parlement[2]. »

Cette résignation désespérée n’était pas du goût d’une jeunesse bouillante, et, d’un autre côté, elle valait à Otis les injures des amis du gouvernement ; c’était, disait-on, un Masaniello qui avait peur de la tempête qu’il avait appelée ; mais, à part quelques âmes emportées, c’était le sentiment général qu’il faudrait obéir. Ce n’est pas volontiers qu’un peuple laborieux, sage et patient, envisage les dangers d’une révolution. Il y a dans tous les grands événements un calme qui précède et qui annonce l’orage : on en était là.

Ce fut de la Virginie que partit l’étincelle qui devait tout enflammer. L’assemblée coloniale était réunie ; les chefs ordinaires de l’opinion, presque tous grands propriétaires, avaient évité de toucher à une question brûlante ; mais à la fin de la session, aux derniers jours de mai, un jeune avocat qui venait d’entrer à la Chambre, et qui y était à peu près inconnu, Patrick Henry, sans avoir consulté personne que deux membres, proposa tout à coup des résolutions d’une

  1. Bancroft, Amer. Rev., t. II, 310.
  2. Bancroft, ibid., II, 308.