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écrasée, est-ce un argument logique en faveur de la servitude ? Les richesses des Antilles, l’intérêt de la métropole, ne peuvent fausser la balance de la vérité et de la justice. La liberté est un don de Dieu, rien ne peut l’anéantir.

« Les droits politiques et civils des colons anglais ne reposent pas davantage sur une Charte de la couronne. La grande Charte, si vieille qu’elle soit, n’est pas le commencement de toutes choses ; elle n’est pas sortie du chaos au jour de la création. Un jour peut venir où le Parlement déclarera nulle et de nul effet toute Charte américaine ; mais ce jour-là les droits des colons, comme hommes et comme citoyens, ces droits naturels, inhérents à leur qualité, inséparables de leurs têtes, ne seront pas atteints. Périssent les chartes, ces droits dureront jusqu’à la fin du monde.

« La distinction des taxes extérieures et intérieures n’a point de fondement. Si le Parlement peut taxer notre commerce, il peut taxer nos terres, établir la dîme, établir le timbre ; il n’y a point de limite à son autorité. Ces impôts, quelle que soit la chose qu’ils frappent dans les colonies, commerce, terres, maisons, vaisseaux, meubles, sont inconciliables avec les droits des colons, comme sujets anglais et comme hommes. Tout acte du Parlement contraire aux principes fondamentaux de la Constitution anglaise est nul de soi.

« Les colons n’ignorent pas ce que l’indépendance leur coûtera de sang et d’or. Ils n’y songeront jamais, à moins qu’ils ne soient poussés à ce moyen suprême par cette oppression ministérielle qui rend fous les plus sages, et qui rend forts les plus faibles. Le monde est à la veille du plus grand spectacle qu’aura jamais vu l’humanité. Qui veut gagner le prix, Dieu est avec lui. L’humanité veut en finir avec cette servitude générale qui a si longtemps pesé sur elle, l’humanité triomphera[1]. »

Malgré ce langage énergique, Otis ne songeait à rien

  1. Bancroft, Amer. Rev., II, 231.