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gouvernement et sur les droits naturels de l’homme et du citoyen. Otis nous donne un résumé de sa philosophie politique ; on y voit à quel degré on en était arrivé dans ce pays, que l’Europe regardait comme bien au-dessous d’elle par la civilisation, et qui, en politique, était de plus d’un siècle en avant de ce continent qui le dédaignait.

« Le gouvernement, dit Otis, n’est pas fondé sur la force, comme Hobbes le prétend, ni sur un contrat : c’est la théorie de Locke et de la révolution de 1688 ; ni sur la propriété, comme l’a prétendu Harrington, dans son Océana. Il sort des besoins de notre nature ; il a son fondement éternel dans l’immuable volonté de Dieu. C’est au même instant que l’homme est entré dans le monde et dans la société.

« Dans toute société humaine, il doit exister une volonté souveraine, dont les décisions suprêmes n’ont d’appel qu’au ciel. Ce souverain pouvoir est originairement et finalement dans le peuple. En fait, jamais peuple n’a renoncé librement à ce droit divin ; en droit, toute renonciation est nulle. Royauté et prêtrise sont des inventions pour attraper la foule. Le bonheur de l’humanité demande que cette antique et puissante alliance soit brisée à jamais.

« Dans la grande Charte qu’il a donnée à la race humaine, le tout-puissant Monarque de l’univers, ce Maître qui sait tout, a placé la fin du gouvernement dans le bonheur des hommes. La forme du gouvernement est laissée aux membres de chaque société ; l’organisation du gouvernement et son administration doivent être conformes à la loi de la raison universelle. Il n’y a pas de prescription assez longue pour annuler la loi de la nature et la concession de Dieu, qui a donné à tous les hommes le droit d’être libres. Quand tous les princes, depuis Nemrod, auraient été des tyrans, cela n’établirait pas le droit de la tyrannie. Lorsque les dépositaires de la puis-