CONVENTION NATIONALE.
SÉANCE DU VENDREDI 19 JUILLET 1793[1].
Rapport de Lakanal.
De toutes les propriétés, la moins susceptible de contestation,
celle dont l’accroissement ne peut ni blesser l’égalité
républicaine, ni donner d’ombrage à la liberté, c’est
sans contredit celle des productions du génie ; et si quelque
chose doit étonner, c’est qu’il ait fallu reconnaître cette propriété,
assurer son libre exercice par une loi positive ; c’est
qu’une aussi grande révolution que la nôtre ait été nécessaire
pour nous ramener sur ce point, comme sur tant d’autres,
aux simples éléments de la justice la plus commune.
Le génie a-t-il ordonné, dans le silence, un ouvrage qui
recule les bornes des connaissances humaines : des pirates
littéraires s’en emparent aussitôt, et l’auteur ne marche à
l’immortalité qu’à travers les horreurs de la misère. Eh ! ses
enfants !... Citoyens, la postérité du grand Corneille s’est
éteinte dans l’indigence !...
L’impression peut d’autant moins faire des productions d’un écrivain une propriété publique, dans le sens où les corsaires littéraires l’entendent, que l’exercice utile de la propriété d’auteur ne pouvant se faire que par ce moyen, il s’ensuivrait qu’il ne pourrait en user sans la perdre à l’instant même.
- ↑ Moniteur du dimanche 21 juillet 1793.