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Déplorable effet de nos troubles civils, le sanctuaire des arts était devenu un théâtre de guerre, et les chefs-d’œuvre du génie ne décoraient plus qu’un bivouac.
A onze heures, on vit paraître dans la cour des Tuileries des troupes nombreuses de volontaires qui allaient se joindre à la maison du Roi. On distinguait parmi elles le corps des officiers de la marine, conduit par une douzaine de vieux amiraux couverts de blessures, la plupart échappés aux désastres de Quiberon, et qui semblaient n’avoir survécu à l’ancienne gloire de notre marine que pour attester son existence. Ces nobles gardiens du pavillon français venaient apporter au pied du trône les derniers efforts de leur courage, dans l’espérance au moins de mourir sur les ruines de la monarchie.
La garde montante arriva à midi ; elle était composée de détachements des 7° ; 8° ; 11°, et 12° légions, sous les ordres de M. le major Léger de Bresse, officier très distingué. Depuis que le poste des Tuileries avait été renforcé et porté à six cents hommes, la garde nationale occupait quatre corps de garde, celui de la fontaine, du pavillon Marsan, du théâtre, et du pavillon de Flore : les trois premiers servaient à relever les sentinelles et à faire des patrouilles ; le dernier était plutôt une forte réserve disponible à tout événement, et pouvant envoyer également des patrouilles pour dissiper les rassemblements. Ce dernier poste fut occupé par la 11° légion, à laquelle le major appartenait, et la 12°, qui se trouvèrent commandés par deux capitaines sur lesquels on pouvait compter dans toute circonstance ; M. de la Galisserie, chef de division aux ponts et chaussés, et M. Thouin, entrepreneur de bâtiments. Sitôt que nous fûmes entrés au corps de garde, qui n’était