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FONTENELLE.

risque d’être téméraire en voulant philosopher sur ses mystères ». Fontenelle ne peut ignorer que c’est là, déjà en son temps, la manière de voir à peu près générale du monde savant et il ne manque jamais dans ses Éloges de noter que les hommes qu’il loue d’avoir été de bons philosophes, c’est-à-dire des savants consciencieux et probes, ont été aussi de bons chrétiens. Personnellement même, il peut paraître, et par sa vie et par sa mort, assez fidèle aux enseignements que lui donnait, avec une inquiétude souriante, la douce et pieuse Marthe Corneille à qui « de petites vertus morales » ne suffisaient pas. Il peut le paraître surtout quand on songe qu’il a dit de l’Imitation peut-être la plus belle parole qu’on en ait dite en l’appelant « le plus beau livre qui soit sorti de la main d’un homme puisque l’Évangile n’en vient pas » ; quand on songe que, sans malice aucune, il a essayé de prouver scientifiquement l’existence de Dieu, et qu’il a écrit enfin le Discours, qui s’appellerait mieux le sermon, sur la Patience (1689). Quand le Messie naquit, y dit-il en substance, ardemment désiré par tout un peuple, mais nécessaire à tous, alors « les idées et du vrai et du bien nous furent révélées sans obscurité et sans nuages ; alors disparurent tous ces fantômes de vertus qu’avaient enfantés les philosophes ; alors des remèdes tout divins furent appliqués avec efficace à