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maîtres s’attachaient à leurs domestiques !… on était de la famille, on avait les clefs de la cave !… et, quand vous mouriez, on vous faisait une pension viagère. Mais la Révolution a passé par là !… Je crois pourtant que je ne serai pas mal ici, chez madame Suzanne de La Bondrée… Mais il y a une chose qui me froisse… je crains d’être entré chez une cocotte… À chaque instant, il vient des petits messieurs qui apportent de bouquets !… Si elle n’a qu’une connaissance, passe !… mais si ça frise l’inconduite, je partirai… ou je demanderai une forte augmentation… d’autant plus que cette maison est pleine de courants d’air… on s’y enrhume ! (Il se mouche avec un bruit imitant la trompette.) Personne ne ferme les portes ici.

Eusèbe Potasse, paraissant à la porte du fond.

Pardon, monsieur !

Jean.

Fermez la porte !

Eusèbe, fermant la porte. - Oui, voilà… voilà… (À Jean.) Madame Suzanne de La Bondrée, s’il vous plaît ?

Jean, le regardant et à part.

Tiens ! un petit crevé ! (À Eusèbe avec compassion.) Pauvre enfant, vous ne craignez donc pas de faire du chagrin à votre famille ?

Eusèbe, étonné. - Moi ? Je demande madame Suzanne de La Bondrée.

Jean.

Elle n’est pas levée ?… À neuf heures !… Allons… donnez votre bouquet… on le mettra dans le tas !

Eusèbe.

Mais je n’apporte pas de bouquet, je suis élève en pharmacie…