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ont la tournure toute différente de celles qu’ils font avec lui ; et qu’au contraire son répertoire à lui porte partout la même empreinte, la même marque de fabrique, reconnaissable entre mille, qui par conséquent ne peut être que la sienne propre. Par quel procédé de collaboration est-il arrivée cette unification ! Je puis en parler savamment, ayant eu le très-grand plaisir de faire une pièce avec lui, non pas sa meilleure, hélas !

Or voici comment les choses se sont passées : Nous avons fait ensemble un scénario très-développé, pour lequel je lui servais plutôt à l’exciter par la contradiction qu’à lui donner des idées, car elles lui venaient si vite, que je n’avais pas le temps d’en avoir moi-même ; après quoi, il m’a demandé la permission, que je lui ai généreusement octroyée, d’écrire la pièce tout seul, à la charge par moi de revoir son travail et de l’arranger à ma guise ; j’ai refait quelques bouts de scène, pratiqué quelques coupures, et voilà. Je n’oserais pas affirmer que le rôle de ses autres collaborateurs ait été aussi modeste que le mien ; mais il est probable que le procédé a été analogue. Il est certain que dans tout concubitus il y a un mâle et une femelle ; or il n’est pas douteux que Labiche est un mâle.

Le style, c’est l’homme. S’il est un auteur pour qui cet aphorisme soit juste, c’est assurément Labiche. Il ressemble à ses pièces et ses pièces lui ressemblent ;