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Onésime-aimé léger



Onésime-Aimé Léger, je te salue !

Je ne peux penser à ce fier artiste sans me sentir tout vibrant de sympathie pour cette belle intelli­gence, pour ce grand cœur, ce vigoureux talent, cette âme généreuse, cet esprit indépendant et ce cerveau bouillant de nobles révoltes.

Léger, je suis heureux de le dire, n’a pas été une unité de l’immense troupeau, servile et sans dignité, qui accepte aveuglément tous les credos. Il a réellement été un homme, il a su penser par lui-même. Il a eu ses opinions et il n’a pas craint de les exprimer. Esprit tourmenté, il avait la haine de ceux qui ont cherché à enterrer les idées, à éteindre la pensée, et son œuvre-véhémente, vengeresse, est un terrible J’Accuse lancé à l’adresse de ceux qui ont voulu étouffer la vérité et bâillonner la voix de la conscience. Léger a ressuscité dans ses tableaux quelques-unes des grandes victimes de l’intolérance du passé et il nous a montré leur martyre. Il a représenté le vieux Galilée proclamé hérétique et enfermé dans une prison pour avoir soutenu que la terre tourne autour du soleil et il nous a fait voir l’imprimeur Étienne Dolet sur son bûcher.

Dans un tableau empreint d’un sentiment dramatique in­tense, Léger a campé la Justice, représentée sous les traits d’une femme géante qui vient de briser les chaînes qui la liaient, accusant le cardinal Ximénes de tous les crimes com­mis par l’Inquisition dont il était l’âme. La scène est un cau­chemar d’horreurs. Sous un ciel bas, chargé d’épais nuages