pain, pas un verre de liqueur dans la maison, pas une fleur dans le jardin.
Avant de rentrer chez elle pour la nuit, Lucienne s’approcha de son père :
— Donne-moi un verre de fort, demanda-t-elle.
Surpris, il la regarda curieusement, car ce n’était pas dans ses habitudes de prendre de l’alcool. Néanmoins, il alla dans sa chambre, sortit une bouteille d’une cachette et commença à verser.
— Tu me diras quand ce sera assez.
— Verse ! verse ! dit-elle.
Alors, il emplit le verre et s’en versa un pour lui.
— À ta santé, dit-il.
En deux ou trois gorgées elle avala la forte dose qui lui avait été servie. Prenant ensuite elle-même la bouteille, elle se versa un autre verre et le vida rapidement.
— Bonsoir, fit-elle, et elle se sauva chez elle.
En quelques minutes, l’alcool avait produit son effet. Elle était à moitié ivre. Alors, lourdement, gauchement, elle se dévêtit et se jeta dans son lit. Lorsque son mari la rejoignit quelques minutes plus tard, elle avait à peine conscience de ce qui se passait, et, lorsqu’il la prit, elle ne se donna pas, elle s’abandonna, sachant à peine ce qui lui arrivait.
Le lendemain, elle se leva très tard, fatiguée comme elle ne l’avait jamais été, mécontente, irritable. Au déjeuner, maladroitement, elle cassa une assiette.
— Fais attention, ma poule, autrement tu vas me coûter cher, remarqua en badinant le mari.
— Finis donc, imbécile ! C’est assez de vivre dans un poulailler sans me faire traiter de poule. Pourquoi n’as-tu pas trouvé une maison ?
Ainsi rabroué, Robillard resta coi.